Un périple entre asphalte et mangrove
Après ces préparatifs sur carte, il est temps de se frotter au terrain. Première étape : 4 jours à Bahia Drake. A ce seul nom, des images de village reculé au bord de la mer surgissent. J’imagine un repère de pirates où le rhum coule à flots. Niveau pirates, on repassera mais pour l’isolement je ne devrai pas être déçu au vu du périple qui s’annonce.
La séparation difficile avec l’oreiller de la Maleku hostel laisse la place à une mécanique rodée d’enchainements de taxis et d’attente curieuse au terminal de bus. Je découvre aussi le confort des bus ticos plus proche des collègues équatoriens que péruviens, soit le strict minimum. Qu’importe, la chaine centrale et la côte Pacifique se déroulent et avec eux la première obs de Motmot et une poignée d’Elanions à queue blanche à la pause casse-croute.
A Sierpe, l’aventure monte d’un cran avec la dernière phase : le bateau vers Bahia Drake. Les 3 heures d’attente permettent aux jumelles de faire leur première sortie pour deux espèces de Tyrans et le premier Caïman. Seul bémol : la pluie battante. Le trajet fluvial est donc plutôt frustrant, toute tentative pour jeter un œil sur la mangrove environnante se soldant par une drache à l’horizontale grâce à une subtile combinaison de vent de face et d’accélération du bateau.
C’est trempés jusqu’aux os que l’on débarque à Bahia Drake et trempé que je me présente aux cabinas Jade Mar, où les chambres à 15$ sont toutes prises. Mais à la vue de mon air de chien perdu qui sort du bain forcé, la taulière a pitié et me propose un bungalow à 25 $ pour 15 cette nuit. Je peux enfin me poser et sèche tranquillement en buvant un coup avec mes colocs les Geckos, dans les starting blocks pour demain.
Où les jumelles et le reflex reprennent du service.
Au matin, pas de pression. En attendant ma nouvelle chambre, le jardin est largement suffisant pour une première session d’ornitho Costa-Ricaine, et prendre 200 photos. Avec entre autres les premiers Aras macaos, un Pic à couronne rouge et un gros Iguane vert (pas farouche à cinq mètres de la terrasse) pas besoin d’aller au cœur de la jungle pour se gaver.
Une fois installé pour les 4 jours, on s’active. Première chose : Trouver un guide pour une session d’herpétologie nocturne, deuxième : Réserver la plongée à l’Isla del Cano le lendemain. Je dois renoncer au Corcovado en voyant le prix des tours, pas les moyens en ce dernier mois de tour du monde. Le reste de la journée c’est surtout tri des photos Équatoriennes avec vue directe sur la mangeoire de l’hostal.

L’Ara macao à Bahia Drake a un statut particulier. De très mal barré ces 40 dernières années à cause du braconnage/trafic/disparition d’habitat, il s’est remis doucement à coups de programmes de conservation volontaires et ambitieux. Autour de Bahia Drake, les efforts ont porté leurs fruits puisque l’espèce est plus que fréquente, c’est devenu le pigeon local.
Première sortie herpéto
Le soir enfin. Mon guide David me récupère avec Isi et Raphaël, 2 voyageurs espagnols, et on file en pick-up à 2/3 km du village. Très vite le courant passe et David comprend vite qu’on est comme qui dirait collègues et que la session herpétologie du soir va être cool.
Malgré une météo un peu sèche, les observations sont nombreuses mais le chemin casse-gueule dans la selva. Les petites bêtes sont au rendez-vous, entre la fameuse Araignée banane, la Rana de lluvia et autres Écrevisses bleu électrique. David est un guide au top et qui est passionné avant tout et sait le partager. Selon lui, le meilleur moyen de protéger la nature est de la faire aimer, et pour ça il faut commencer par être soi-même à fond.
En fin de sortie, c’est un peu la frustration, ça fait 2h qu’on cherche des grenouilles de verre. En dépit de nos deux paires d’yeux scrutant chaque cm² de végétation, la bougresse reste invisible, mais pas silencieuse. Une vingtaine qui chantent dans les feuilles au bord du ruisseau et on trouve même plusieurs pontes sous les feuilles. Cette petite bête à la particularité d’être transparente. Par desous, les organes sont visibles mais sur le dessus, elle est vert feuille, d’où le challenge pour la trouvre. On finira par trouver à la dernière minute un individu de Hyalinobatrachium fleischmanni sur une feuille pour une session photo de cette beauté qui aura su se faire désirer.
Du gros à l’Isla del Caño
Ce matin, c’est plongée au programme, la première depuis Nouméa. Enfin pas vraiment puisque je me plante de RDV en allant au bureau au lieu de la plage. Je me retrouve donc à poireauter trois plombes pour rien. La plongée sera pour demain, mais l’attente vaudra le coup. L’aprèm, je croise trois voyageurs rencontrés sur le bateau et un couple d’Ara macao en buvant une bière sur la plage.
Le lendemain donc et sur la plage ce coup-ci. La traversée vers l’Isla del Caño est assez silencieuse, les guides sont moins marrants qu’à Nouméa et j’échange peu avec les autres participants, hormis un français qui sera mon binôme.
L’Isla del Caño est plus réputée pour les grosses bêtes que pour les coraux, et effectivement le fond est assez pauvre. On a quand même droit à une paire de Requins pointe blanche et une Tortue caouanne, mais cette première session est plutôt pauvre.
Heureusement, la seconde rattrape le coup. Si le premier quart d’heure est plutôt similaire à la première plongée, les choses changent radicalement quand mon collègue cogne à ma bouteille en braillant dans son détendeur. La raison est simple : une Raie manta de 5 mètres de diamètre passe à notre droite !! Le contact dure 30 secondes et nous sommes les seuls du groupe à y avoir droit. J’en chialerai de bonheur si on n’était pas 20m sous l’eau. Tout retourné et alors que la journée ne pourrait pas être meilleure, 5 autres raies qui se pointent ! Cette fois tout le monde les a vues et sur commande du guide, on s’immobilise. Les Raie curieuses nous tournent autour et c’est alors que commence un ballet dont la durée est impossible à estimer tellement je suis scotché. Là, à 3 mètre de moi un groupe de Raies manta me tourne autour…
Du retour vers Bahia Drake, zéro souvenir. Mon esprit à buggé au fond de l’eau et ces 5 raies sont toujours scotchées à ma rétine. Bilan après seulement 5 jours au Costa-Rica : Au top !
Une petite rando ça repart
Le lendemain, journée tranquille, je pars explorer le sentier qui longe la côté jusqu’à la Playa Sajosecito. Ça commence avec un Basilic commun, le fameux lézard qui se prend pour Jésus en courant sur l’eau.
Côté ornitho j’arrive à voir une quinzaine d’espèces de plus. Je finis cette journée avec un bizutage en règle des capucins qui me gratifient d’une douche maison pendant la pause gouter. Ces petits enfoirés ayant réussi leur coup, ils se barrent rapidement quand je lève le nez en constatant que, non, ce n’est pas de la pluie…
Mais le temps avance et mon séjour à Bahia Drake touche à sa fin. Le plan pour la suite est d’aller vers Los Cusingos mais ça ne répond pas au téléphone. Le plan B sera donc Costa de Pajaros dans le golfe de Nicoya. Au programme : des mangroves, des hérons et autres oiseaux migrateurs, mais aussi zéro touristes pour un moment 100% tico.