Les 24-25 avril derniers, j’ai eu la chance de participer au salon des blogueurs voyages (ou WAT18) à Millau.
Depuis Lyon la route passait par la Lozère et j’en ai profité pour faire un arrêt sur le Méjean, un des 4 Grands Causses avec les causses Noir, de Sauveterre et du Larzac.
C’est aussi sur ce dernier que j’ai participé à un blogtrip le lundi 23.
Blogtrip, kézaco ? Ces petites expéditions par groupes de 5-6 blogueurs aux quatre coins de l’Aveyron avaient pour but de promener ses yeux et de découvrir tout ce que le territoire a à offrir d’activités, de rencontres, et d’observations.
Petit aperçu de mon passage sur ces deux Grands Causses pour un voyage à la fois à l’autre bout du monde et au cœur même de la France.
Un peu de contexte
Le Parc national des Cévennes offre une variété de paysages et de végétations que l’homme a façonné depuis des siècles, avec une agriculture adaptée à chaque territoire.

– Le Mont Lozère (1699 mètres), granitique et frais, ressemble au nord du département (Aubrac, Margeride) et à l’Auvergne. La végétation plutôt montagnarde varie entre prairies fleuries et tourbières peuplées de plantes carnivores.
– Au sud du Parc, le Mont Aigoual (1567 mètres) est le domaine de la Hêtraie fraiche et verdoyante. Sur le versant sud, le massif bascule vers un climat plus méridional.
– Les vallées cévenoles, entre Lozère et Gard, sont marquées par le schiste et crêtes et vallées encaissées et isolées se succèdent. Le climat plus doux est ici propice au Châtaigner et au Chêne.
– A l’ouest, les Grand-Causses sont de vastes plateaux calcaires découpés de gorges vertigineuses (Tarn, Jonte, Dourbie). Peu de prairies ici, la végétation, dite xérophile, est adaptée à la sécheresse et ce sont les pelouses qui dominent.
Le Méjean : France ou Mongolie ?
A plus de 1000 mètres, le paysage est aride voire désertique. Les étendues herbeuses couvrent des kilomètres, interrompues çà et là par des murets et des clapas qui forment de petits tas de pierres au milieu de la steppe.
L’eau est ici une denrée rare pour la nature et les hommes. Cette rareté a conduit l’agriculture à se spécialiser vers le seul animal d’élevage qui pouvait prétendre pâturer ces grands espaces desséchés, j’ai nommé la brebis.
Pendant des siècles, des troupeaux se sont succédé dans ce milieu idéal pour cet animal, plus adapté à la sécheresse du causse qu’à l’humidité des vallées.
Le pâturage a maintenu à l’écart arbres et arbustes, forêt et lande, et a permis l’apparition de la Stipe pennée, une petite graminée typique de la steppe Mongole qui, au printemps, fait monter le causse d’un cran dans la beauté.
A partir de Mai, son inflorescence flottant au vent donne au causse un air de mer argentée, où les fans de Game of Thrones s’attendraient presque à voir surgir une horde Dothraki (ce qui gâcherait la journée).
Il faut savoir que la Stipe est protégée et que si elle est partout abondante dans la moitié Est du causse, elle est surtout la représentante d’un écosystème rare et fragile. Sa présence repose sur une combinaison de conditions climatiques et géologiques associées à une agriculture adaptée à ce territoire.
Malgré tout, le paysan caussenard a su exploiter toutes les ressources de son environnement et les fonds de vallons plus humides, ou dolines, sont occupés par des cultures de céréales pour varier l’alimentation des animaux.
Mais cette steppe fragile est menacée. Le causse nu tel que je vous le présente régresse. Au fil du temps, avec la déprise agricole et la plantation de boisements résineux artificiels, la forêt à colonisé la moitié Ouest du plateau.

Au top le blogtrip 19 !
Mais après deux jours d’exploration du Méjean en solo, il est temps de se diriger vers Millau pour retrouver les collègues blogueurs.
Le dimanche soir, je débarque un peu. Je suis un petit nouveau dans un monde totalement inconnu et un peu intimidé. Malgré tout, et l’alcool aidant, je parviens à papoter rapidement avec des blogueurs plus expérimentés et à apprendre déjà quelques trucs, ça s’annonce bien !

Après une bonne nuit de sommeil réparateur, je suis au taquet en ce lundi matin. Sur le parking de l’hôtel, une file de minibus attend les blogueurs. Les groupes s’égrènent lentement et je trouve finalement le panneau « Rando sur le Causse », en dessous il y a Fabrice, un sourire d’une oreille à l’autre et l’accent du sud-ouest.
Je le rejoins avec les autres blogueurs qui ont préféré aller sur le Larzac plutôt que de démarrer la journée par une session saut à l’élastique/parapente/via ferrata (rayer la mention inutile). On est 6 à suivre Fabrice : Dana et Stéphane du Monde de Tikal, Emma de Planet Addict, Julien des Sentiers du Phoenix et Valérie de Mon Expérience Voyage. Après 20 minutes de route pour monter sur le causse, tout le monde descend et la balade commence.
C’est plus une balade qu’une randonnée. On marche peu car Fabrice est très bavard, mais c’est parce qu’il est passionné. Il nous explique tout ce qu’il sait sur le causse, la géologie, l’adaptation de l’agriculture (vous en avez eu un avant-gout plus haut) et les stratégies végétales des arbres face à la sécheresse.

Le Larzac est plus boisé que le Méjean, mais ce n’est pas sans raison, ce causse est le domaine du buis. Ce petit buisson, l’air de rien, joue un rôle majeur. D’une croissance lente avec un bois très dense, il a développé de plus petites feuilles que les autres arbres pour diminuer ses besoins en eau et passer la longue saison sèche plus facilement. Sans action de la brebis, il serait partout avec le Génévrier. Mais voilà, l’homme a vite compris l’intérêt qu’il avait à en garder un peu.
Fabrice nous fait découvrir les bouissières. Ces petits passages secrets sont utiles en toute saison. L’été, elles permettent de parcourir le causse au frais, à l’abri de la chaleur écrasante qui règne alors. En hiver le causse est froid, mais il l’est encore plus quand le vent souffle. Les bouissières permettent alors de se déplacer à l’abri de cette barrière naturelle, pratique non ?

La différence avec le Causse Méjean se fait aussi ressentir chez les oiseaux. Alors que le Méjean est dominé par l’Alouette des champs, sur le Larzac elle cohabite avec l’Alouette lulu. La première est une afficionada des milieux largement ouverts avec peu ou pas d’arbres ou arbustes (causse nu, plaine céréalière) mais la seconde préfère les paysages plus hétérogènes, mixant zone ouvertes avec friches, landes, vignes et autres fourrés.
Entre les pelouses pâturées et les massifs de buis et de genévrier, il y en a pour tous les goûts sur le Larzac.

A fur et à mesure que l’on avance, on peut admirer quelques plantes du Causse, dont des orchidées. Côté piafs, j’ai droit à une petite Fauvette passerinette. Ce tout petit oiseau est une spécialité du sud de l’Europe et c’est ma première observation de ce petit lutin du causse et de la garrigue. Enfin, même si la saison des papillons ne fait que débuter, les Argus verts sont partout.
Fabrice nous emmène vers un chaos rocheux pour déguster une fouace. Ce petit dessert 100% aveyronnais nous cale le bide en cette fin de matinée. On profite de la vue à (presque) 360° sur le Larzac alors qu’une quinzaine de Vautours fauves, plus deux Vautours moines (plus rare) nous survolent, et un petit lézard des murailles nous tolère près de son abri.
Mais voilà que le retour arrive. En revenant au minibus, le Larzac nous gratifie d’un gros mâle de Lézard vert qui se prélasse tranquillement au soleil (mais ne se laisse pas approcher, tant pis pour la photo).
Retour à Millau pour un déjeuner 100% aveyronnais (oui au farçous ! un peu moins au tripous) et une après-midi escalade dans les Gorges de la Dourbie. La session grimpe se passe au top, au fond d’un petit vallon. Les voies partent dans les bois mais une fois en haut, on découvre un petit panorama sur les rochers qui dominent les gorges.
Le WAT ne fait que commencer, demain, les choses sérieuses débutent mais je suis déjà dans l’ambiance, et encore plus fan de l’Aveyron que je ne l’étais.
Merci encore à la Team We are travel pour l’organisation au petits oignons, je n’oublierai pas ma première participation de si tôt. Merci aussi à la team de l’Office du tourisme de Millau, pour ce qui est de l’hospitalité et l’accueil aveyronnais, on aura été servis !
La minute 100% nature
Chez les oiseaux, l’Alouette des champs est omniprésente et déverse du matin au soir son chant sur le causse comme une cascade sonore sans fin (regardez par ici vous n’oublierez plus son chant).
Elle partage le causse nu avec d’autres passereaux habitués des zones sans arbres ou arbustes : le Pipit rousseline, d’affinité méridionale et le Traquet motteux.
Les pelouses sèches sont aussi un paradis pour observer orchidées et papillons (plus de 100 espèces recensées).
Pour les reptiles, les murets de pierres et clapas qui parsèment le causse sont des refuges de choix. Les espèces présentes ne sont pas méridionales, les hivers étant froids, mais sont quand même thermophiles (Vipère aspic, Couleuvre verte et jaune, Lézard vert) ou aiment le minéral (Coronelle lisse).

Dans les dolines, on trouve plus de passereaux granivores (Bruants jaune, ortolan et proyer, Moineau domestique et soulcie…) et la Linotte mélodieuse, avec sa calotte et poitrine rouge carmin, est fréquente.
Çà et là, des chaos rocheux permettent aussi de croiser le Crave à bec rouge ou le Monticole de roche, particulièrement magnifique avec sa combinaison bleu et orange.

Enfin, les panoramas sur le causse nu sur des kilomètres sont des secteurs en or pour observer les rapaces en chasse : un Busard cendré planant à la recherche d’un campagnol, un Faucon crécerelle qui fait du sur place, un Circaète qui plonge sur un serpent/lézard voire même un curée de vautours qui nettoie une carcasse de mouton.

En pratique
Où admirer le causse nu sur le Méjean :
Les plus beaux secteurs pour admirer le causse nu sont au sud-est du plateau. La commune de Hures-la-Parade offre des vues magnifiques et des milieux bien conservés.
La plaine de Chanet, autour de l’aérodrome de Florac, donne un bon échantillon du Méjean entre pelouses pâturées et dolines cultivées. C’est aussi un bon secteur pour rechercher des rapaces en chasse.
Le croisement entre la D986 et la D63, au lieu-dit les Redoundous offre aussi des panoramas époustouflants sur le causse nu ainsi que la possibilité de se garer facilement pour prendre des photos. Pipits rousseline et Bruants ortolans y sont fréquents.
Quand venir ?
La meilleure saison pour admirer le causse nu magnifié par la Stipe pennée court de Mai à Juillet.
Pour les oiseaux, Mai et Juin sont préférables car tous les oiseaux migrateurs sont revenus et la température est plus clémente
L’été est le meilleur moment pour s’intéresser aux papillons. Le Causse Méjean à lui seul abrite plus d’une centaine d’espèces.
Comment y aller ?
En fonction d’où vous venez, la porte d’entrée sera différente :
– En venant du nord (Clermont-Ferrand), l’A75 jusqu’à la sortie Séverac-le Château, puis la D995 vers Les Vignes permettent d’aborder le causse par les Gorges du Tarn pour une route qui serpente comme jamais mais une vue à la remontée qui vaut tout l’or du monde.
– Du nord-est (Lyon), la N88 va de St-Etienne à Mende puis la N106 à Balsièges permet de rallier Florac.
– En venant du sud-ouest (Montpellier-Toulouse), rejoignez Millau pour rallier le Méjean en longeant le Tarn jusqu’au Rozier via les D809 et D907. Ensuite faites votre choix : Gorges du Tarn ou de la Jonte.
– En venant du sud-est (Nîmes, Marseille), rejoignez Florac en passant par Alès (N106).
J’espère que vous en savez un peu plus sur les Grand Causses et que ça vous donnera envie d’aller voir tout ça de plus près.
Commentaire pour “Un petit tour sur les Grands Causses”